Fuir l’Ankou (Terminus Belz, roman d’Emmanuel Grand)
Terminus Belz, paru chez Liana Levi en 2014, a eu le prix Tenebris en 2015 pour le meilleur roman francophone diffusé au Québec et le prix SNCF du Polar 2016.
C’est le premier roman d’Emmanuel Grand qui mêle des pêcheurs bretons insulaires, des Ukrainiens qui fuient leur pays, les mafias russo-roumaine et marseillaise et les terrifiantes légendes bretonnes, telles que les a retranscrites Anatole Le Braz (1859-1926) avant publication en 1893 sous le titre « La légende de la mort » – lire ces récits, comme je l’ai fait, dans un petit village du Finistère en hiver, au milieu des brumes, des craquements et du gémissement du vent, est une expérience unique : on finit par sursauter au moindre bruit et se cacher sous les couvertures….
L’Ankou, cette figure mythique de la Bretagne, habillé d’une grande cape noire et coiffé d’un large chapeau qui cache des traits effacés par la décomposition, a pour rôle de collecter les âmes. Il est un des personnages secondaires essentiels de ce roman. Si on le croise, on est sûr de mourir dans l’année.
Comme dans le film le chant du loup, on est dans un autre monde, celui des marins, qui côtoie celui des vivants et des morts, pour reprendre la citation d’Aristote (Il y a trois sortes d’hommes : les vivants, les morts et ceux qui vont sur la mer).
Le jeune Marko arrive sur l’île de Belz (inspirée de l’île de Groix) pour fuir la mafia roumaine qui devait l’aider lui, sa soeur et un ami, à fuir l’Ukraine mais dont ils ont volé le camion et l’argent. Embauché sur un chalutier, il découvre un monde rude et violent, mais aussi taiseux et superstitieux. Du curé au libraire, en passant par le pauvre type alcoolique et la jeune femme solitaire, tous créent un lien avec lui mais lui ne sait pas tout d’eux.
Emmanuel Grand qui ne connait pas l’Ukraine et peu la Bretagne, nous embarque dans une histoire complexe et humaine, passionnante jusqu’au bout, faisant ainsi la preuve qu’un roman policier n’est pas un documentaire qui vise l’exactitude mais une transcription -ou une interprétation- des ressorts de l’âme humaine.
Et ne passez pas à côté des légendes collectées par Le Braz! Vous découvrirez l’Ankou, mais aussi les intersignes, les voyages de l’âme, les sorts et les noyés….
Tags In
1 Comment
Laisser un commentaire Annuler la réponse.
Abonnez-vous au flux de Niftyfifty!
- En 2014, comme Marcel Jouhandeau, je parlerai de mes amants 25 novembre 2024
- Famille, je vous hais (ou pas) 23 juillet 2023
- Félicité Herzog. Une brève libération 24 mai 2023
De quoi égayer nos journées 😉
Bonne journée à vous alors