En 2021 j’ai vu Ilya Répine (1844-1930)
L’exposition Ilya Répine au Petit Palais, sous-titrée « Peindre l’âme russe », connait un très grand succès. L’occasion de découvrir un peintre peu connu en France.
Répine est né en Russie, en Ukraine précisément et mort en Finlande, où il avait acheté un domaine quand le territoire faisait encore partie de la Russie avant d’être rattaché à la Finlande après la révolution de 1917.
Il a fait beaucoup de portraits, de sa première, puis de sa seconde femme, de ses filles, d’amis, d’artistes et écrivains, comme Tolstoi, Tourgueniev ou Moussorgsky, l’actrice Eleonora Duse, ou le collectionneur Tretiakov, des autoportraits, et ce qu’on pourrait appeler des « tableaux de genre », des processions religieuses, des toiles relatant des évènements historiques, ou des scènes quotidiennes, comme la célèbre toile « Les bateliers de la Volga ».
Il a lui-même qualifié son style de « réalisme populaire » et est le représentant du « réalisme russe.
Ses tableaux savent rendre la personnalité de ses modèles qui semblent poser comme s’ils étaient photographiés sur l’instant.
Exemples : Le portrait de sa première femme, Véra Chevtsova, en 1869, montre une jeune fille de 14 ans (il l’épouse deux ans plus tard) et restitue « une natte de jais, lourde et noire jusque sous la taille, une frange d’enfant sur un front rond et un nez droit, l’arc des lèvres relevé en une fine gouttière », comme l’écrit la critique Aleksandra Pistounova, ainsi qu’une expression fermée, voire méfiante. Le couple ne s’entend pas et finit par se séparer en 1887 malgré leurs quatre enfants (trois filles et un fils). Le peintre supportera très mal cette séparation.
Répine a l’oeil pour les détails qui rendent vivants ses tableaux. Ainsi ces « étudiants se préparant à un examen » (1864. Les modèles sont les neveux d’un ami qui l’héberge à Saint-Pétersbourg) montrent l’un en train de dormir et l’autre regardant attentivement par la fenêtre une jeune fille en robe bleue en train de lire.
Lors d’un séjour à Paris, il s’attache à la vie de la rue et représente un « vendeur de nouveautés » (1873), entouré d’une foule ébahie, semble-t’il, par toutes les promesses qu’on lui fait. On reconnait une colonne Morris à l’arrière-plan. Les enfants sont peints avec vivacité et humour comme les badauds.
On reconnait les blouses des ouvriers et artisans, le livreur, un blanchisseur peut-être, avec son panier en osier sur la tête, le chapeau melon du bourgeois, la nourrice au bonnet blanc avec un enfant dans les bras et la petite fille qui surveille son frère, en lui posant la main sur l’épaule, sa robe protégée par une blouse à carreaux ouverte dans le dos, a la bouche ouverte comme le petit garçon qui lui fait face.
Toujours à Paris, un aperçu d’un Montmartre encore très peu construit, où se trouvent des carrières et des fours à plâtre…
Ses portraits de groupes, comme le bateleur de Paris ou la procession religieuse, comprennent toujours des détails comme pris sur le vif.
Ainsi cette femme en grande tenue et pénétrée de son importance, qui porte pompeusement une icône (détail de la « Procession religieuse dans la province de Koursk » (1883), accompagnée par un domestique qui écarte les importuns.
Ces petits garçons semblent dissipés ou trop bavards. Ils sont suivis d’un homme, élégant dans son costume noir, peut-être le patron de l’homme barbu qui les morigène et pourrait être leur père. Juste devant eux, une paysanne avec son fichu, bien différent du chapeau de la dame empreinte de dignité.
Ou bien ce tableau au titre évocateur « Ils ne l’attendaient plus » qui illustre le retour au domicile d’un déporté (1884). Une bonne l’introduit dans le salon, une femme en noir se lève, une jeune fille au piano se retourne et deux enfants sont surpris, le garçonnet a l’air joyeux, la petite fille est plus circonspecte.
Ou encore ce bel ensemble de colliers de perles et pierres, portés par la jeune Ukrainienne en costume traditionnel, peinte en 1875.
On peut également voir une étonnante représentation d’une opération et des portraits du grand Tolstoï qui a posé, non sans difficultés pour le peintre.
Répine a peint le musicien Moussorgski, dépressif et alcoolique, à l’hôpital militaire de Saint-Pétersbourg, quelques jours avant sa mort à 42 ans en 1881.
Et bien d’autres toiles…
Au Petit Palais à Paris jusqu’au 23 janvier 2022.
On peut voir aussi des tableaux de Répine à l’exposition sur la Collection Morozov, à la Fondation Louis Vuitton.
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Merci pour cette visite guidée ! Magnifiques tableaux qui sont de véritables témoignages d’époque. C’est vrai, ce peintre est très peu connu et c’est bien dommage ! Bonne fin d’année